Pathologie de la muqueuse buccale


Pathologie de la muqueuse buccale
L. Ben Slama



Figure 1 : Multiples nodules de 4 à 5 mm de diamètre au niveau de la 
pointe et des bords marginaux de la langue et de la lèvre supérieure. 


CAS No 2
Une jeune fille de 21 ans se présente à la consultation
avec de multiples nodules de 4 à 5 mm de diamètre au
niveau de la pointe et des bords marginaux de la langue
et de la lèvre supérieure, apparus en quelques semaines,
occasionnant une gêne discrète à l’élocution. Le reste de
l’examen clinique est normal, en particulier, il n’y a pas de
lésion cutanée notable. Un bilan biologique réalisé en ville
est normal, incluant une sérologie VIH 1 et 2 négative.
Dans les antécédents, la patiente signale un phéochromocytome
surrénalien diagnostiqué et traité 2 ans auparavant.
Un nodule thyroïdien récemment découvert est en
cours d’exploration.

Quel est votre diagnostic ?

Figure 2 : Histologie (HES X 25). Epithélium d’aspect normal, les nodules 
étant constitués de multiples filets nerveux entourés d’un périnèvre 
épaissi.

Réponse

Les nodules observés, de petite taille, sont localisés, circonscrits

et font évoquer d’emblée des tumeurs bénignes.

Les diagnostics évoqués ont été fibromes, verrues, neurofibromes

ou fibro-xanthomes. Les verrues et neurofibromes

paraissaient peu probables en absence de lésions

cutanées associées ou de contexte d’immuno-dépression

pouvant justifier la présence de multiples lésions buccales

à human papilloma virus (hpv).

Cinq nodules de la pointe de la langue ont été enlevés

sous anesthésie locale et adressés à l’anatomopathologiste

(fig. 2). Le compte-rendu note un épithélium

d’aspect normal, les nodules étant constitués de multiples

filets nerveux entourés d’un périnèvre épaissi. Ce caractère

permet d’exclure le diagnostic de névromes solitaires.

Le diagnostic retenu est celui de névromes myéliniques,

évoquant une maladie héréditaire pouvant associer ce

tableau à un cancer médullaire thyroïdien. Lors de la consultation

de contrôle, la patiente confirme ce diagnostic,

aboutissement de l’exploration signalée. Elle est prise en

charge en endocrinologie pour complément de bilan et

traitement.

L’association d’une neurofibromatose de von Reclinghausen

et d’un phéochromocytome est relativement

courante, mais les névromes muqueux multiples sont toujours

associés aux signes cutanés de cette maladie, et la

distribution des lésions muqueuses est différente. L’association

de multiples neurofibromes muqueux à un phéochromcytome

et à un carcinome médullaire thyroïde fait

partie des syndromes des néoplasies endocrines multiples

(« multiple endocrine neoplasia syndrome » ou « MEN

syndrome »). Trois types différents sont actuellement distingués.

Le cas présenté correspond au IIb associant à la

triade décrite une hyperplasie des nerfs cornéens. Habituellement,

les névromes muqueux apparaissent longtemps

avant les pathologies malignes associées dans ces

syndromes, ce qui présente un réel intérêt de dépistage.

L’étio-pathogénie de ces multiples néoplasies endocrines

s’explique par un trouble métabolique survenant lors

de la migration des cellules d’origine neuro-ectodermique

à partir des crêtes neurales, les unes se différenciant en

cellules glandulaires, les autres en tissus nerveux.


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